L’arbre du souvenir

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Très tôt,  j’ai  expérimenté, le gout du bonheur, et du paradis…
J’ai eu l’immense chance de passer un temps infini, dans la propriété de mes grands parents.

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Le parc était immense… Aujourd’hui encore, il me parait incroyablement démesuré, mais, avec mes yeux d’enfant, il n’en était encore que plus étendu…
L’un de mes endroits préféré, était un bosquet, composé d’une variété d’arbre, devenu, avec l’olivier, mon préféré : the silver poplar tree, le peuplier argenté…

poplar

Le bosquet en question, comprenait environ 200 peupliers, plantés très près les uns des autres, et dont la hauteur avoisinait les 30 mètres. Mes cousines, que je retrouvais pendant les vacances, et moi, avions fait de ce bosquet, notre terrain de jeu favori…
Je me souviens, comme si cela datait d’hier, du bruissement si particulier des feuilles, au moindre souffle d’air, de ce petit cliquetis, léger et doux. La cime de ces peupliers  était si haute, que le soleil filtrait difficilement, nous offrant une pénombre réconfortante. Lorsqu’il se mettait soudainement à pleuvoir, nous entendions le murmure des gouttes, mais aucune ne parvenait jusqu’à nous… Lorsque le vent se faisait plus fort, les feuilles duveteuses, s’agitaient, comme de grands géants dégingandés. La lumière passait alors, traversant l’ombrage, en petits éclairs crus et argentés. Il me semblait toujours que des petits bouts de miroirs, allaient parvenir jusqu’à nous. Nous fermions alors les yeux, un peu aveuglées par ces rayons si forts.

silver

Au milieu du bosquet, il y avait un grand banc de pierre, du moins, trois énormes pierres, deux à la verticale, et une à l’horizontale, empilées, faisant office de banc. C’était un peu incongru, d’ailleurs, ces énormes blocs, au milieu de cette densité végétale, faisant toujours questionner les visiteurs, sur la façon dont ils étaient arrivés là… Nul ne le savait, en fait…
Mon grand père nous avait favorisé l’accès à ce « banc », bien trop haut pour nous, en disposant, tout autour, de fines tranches de bois, issues  de la coupe transversale d’un tronc. Nous les empilions, selon nos envies, et nos besoins, pour nous faire un marche pied, ou un escalier, bien utiles, pour l’escalade des pierres…

Aussi loin que mes souvenirs d’enfance remontent, ils sont toujours associés à cet endroit magique, un peu hors du temps. Mes cousines et moi, avons souvent évoqué, à l’âge adulte, ce sentiment incroyable de sécurité, et de plénitude, au milieu de cette étendue un peu secrète. Jamais, nous ne nous sommes perdues, d’ailleurs… Par contre, plus d’une fois, il était arrivé que nous fassions la sourde oreille, aux appels lointains de ma grand-mère… Elle remédiait au problème, pour nous trouver rapidement, en envoyant à notre recherche, son chien, un Spitz, aussi craquant qu’une peluche, prompt à nous ramener à la maison, et que, dans ces cas là, je détestais, autant que je l’aimais…

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Un jour, alors que j’étais en vacances sur place, il y a eu un très gros orage… Le genre d’orage, qui vous fait rester sous la couette, en refusant de sortir, même devant la tentation d’un macaron… L’un des peupliers, en lisière de bosquet, et peu loin de la limite de propriété, s’en est trouvé déraciné. C’était vraiment impressionnant, même si, heureusement, aucun dégât autre, n’était à déplorer, les habitations étant situées bien loin du bosquet concerné.
Le voisin, récalcitrant, n’avait pas tardé, néanmoins, à montrer ses plumes, enjoignant mon grand père, à remédier au problème de cet arbre couché, au plus vite, ce qui, bien évidemment, était déjà en cours…

C’est alors que mon grand père a pris une incroyable décision…

Au départ, je ne pouvais y croire… Pendant des années, d’ailleurs, j’ai cru qu’il avait agit sur le coup de la colère, à cause de la visite du voisin. Pourtant, cela ne collait pas… Mon grand père, était la mesure même, et n’agissait pas sans réfléchir…

Je me souviens aussi, des larmes discrètes comme elle, de ma grand-mère, qui, même si elle comprenait cette décision, avait beaucoup de mal à s’y résoudre…

Mon grand père avait décidé de faire abattre tous les peupliers argentés… TOUS…

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Dans les jours, les semaines, et les mois qui suivirent, cette partie du parc, ne fut plus qu’un vaste champ de désolation… Toutes ces souches, alignées comme des combattants morts au sol, me rendaient le cœur infiniment triste…

Il a fallu des années, de réaménagement végétal et paysager, pour que cet ancien bosquet, retrouve de la beauté.

Mais voilà,  ce n’était plus vraiment pareil…

Le banc de pierre est toujours au même endroit, il n’a pas été déplacé. Lorsque je le revois, je repense inévitablement aux peupliers argentés, témoins de mon enfance si joyeuse et insouciante, aux courses folles, au milieu de tous ces géants protecteurs, aux éclats de rire, qu’eux seuls, pouvaient entendre…

Mon jardin actuel, pourtant grand, est environ 100 fois plus petit, que le jardin de mon enfance… Je pourrai, néanmoins, y planter des peupliers argentés, mais ce ne serait qu’en nombre très restreint…

Et les peupliers, moi je ne les trouve beaux, et fiers,  qu’en famille… nombreuse !…

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2 réflexions sur “L’arbre du souvenir

  1. Je peu-plier devant un texte aussi tendre, même si je dois dire que le peuplier me laisse un avis différent. Mon Grand Père a moi était un terrien bien ancré sur ses champs et bois dauphinois sur lesquels il y avait aussi quelques étangs; pour nous les gamins une joie pour « gabouiller » en essayant d’attraper des grenouilles, et pour notre papy une sorte d’assurance pour l’avenir de ses filles: le peuplier était pour lui de peu de valeur et servait juste a faire de la pâte a papier mais il pousse vite et il en plantait des centaines et des centaines autour des étangs pour faire une dot a ses filles. Quand nous (dont moi), les moutards de ses filles ont pu voir ses arbres, ils faisaient 30 mètres de haut et un bruit infernal les jours de vent. Heureusement c’était loin de la grande ferme et heureusement il avait aussi planté des cerisiers, des noyers et des vignes dans les grands prés en dessous de la maison principale. Il y avait aussi des vignes parsemées de pêchers qui produisaient des fruits délicieux fin août; un Pépé écolo car ces arbres étaient attaqués en priorité par les maladies de la vigne. Bon je m’égare encore moi, les peupliers nous faisaient de l’ombre quand même, entre deux grenouilles attrapées dans les étangs, juste avant les taloches distribuées généreusement par la gente féminine familiale: peut être que je n’aime pas beaucoup les peupliers pour ça ????????????. Ouisou doux Nirondelle.

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